Voici l’interview exclusive de cet artiste camerounais à la veille de deux Assemblées Générales de la Sonacam, la Société nationale camerounaise de l’art musical, prévues le 28 février 2023 à Yaoundé. De grosses révélations. Lire et partager.
Afriquepremiere: Docteur Henri Fotso ou Henri Lesentimental, laquelle de ces deux appellations vous plaît le plus ?
Henri Fotso Lesentimental : Je réponds avec fierté aux deux désignations. Mais il m’arrive souvent d’être un peu gêné que Dr Henri Fotso soit confondu avec Henri Lesentimental et vice-versa. Parce que Dr Henri Fotso est plus un homme de sciences sociales, un chercheur, un écrivain, un éditeur, un producteur, un cinéaste, un professionnel de l’information et de la communication, un entrepreneur, un leader associatif et syndical que tout autre chose.
Quant à Henri Lesentimental, c’est un auteur compositeur interprète de musique. Rien de plus qu’un artiste musicien. Donc, Henri Fotso ou Dr Henri Fotso est une personnalité civile différente de Henri Lesentimental qui est plutôt une image artistique. Henri Fotso est une personne tandis qu’Henri Lesentimental est un personnage. Le premier est un homme réel, vrai, palpable, saisissable, socialement responsable alors que le second est un être onirique, un être virtuel, immatériel, un esprit, un état d’âme, un être astral, qui vogue dans le monde des hommes et des êtres tangibles.
Oui, je suis Dr Henri Fotso, spécialiste des Arts du spectacle et de la cinématographie, professionnel de l’information et de la communication, homme de sciences et formateur. Mais je suis aussi Henri Lesentimental, l’homme avec qui il faut toujours prévoir l’imprévisible, parce qu’étant un vrai artiste. A chaque appellation son contexte donc.
Mais aujourd’hui, appelez-moi Henri Fotso Lesentimental, en abrégé HLS.
AP: Nous avons appris que la Sonacam organise des Assemblées Générales (AG) le 28 février 2023 à Yaoundé. Vous qui êtes un proche du Président du conseil d’administration de cette société, vous confirmez également cette information ?
HLS: Oui, je confirme que la Sonacam (Société nationale camerounaise de l’art musical) tient deux Assemblées Générales ce 28 février. Cela est conforme à la Section 1 dans ses articles 22, 23, et 24, des Statuts de la société.
S’agissant de l’ Assemblée Générale Extraordinaire, l’article 24 de nos statuts stipule qu’elle se réunit et délibère sur:
Les modifications des textes statutaires, la dissolution anticipée de la société, la révocation du Conseil d’administration en cas de violation des articles 27 et 31, ou tout autre point inscrit à l’ordre du jour.
Dans le cas d’espèce, l’Assemblée Générale Extraordinaire prévue a inscrit à son ordre du jour un seul point: les modifications des textes statutaires.
Quant à l’Assemblée Générale Ordinaire, l’article 23 de nos statuts stipule qu’elle examine les rapports annuels du Conseil d’administration, du Commissaire aux comptes, du Conseil de Surveillance, et délibère sur lesdits rapports; donne ou refuse le quitus sur les comptes de gestion de la société au Conseil d’administration, adopte le budget de l’entreprise, entre autres points.
Vous voyez, il s’agit d’une échéance capitale dans la vie du mouvement musical camerounais. Elle va mobiliser plus de mille (1000) artistes et ayants droit venus de dix régions du Cameroun et de la diaspora. Ça va être une effervescence particulière à l’Hôtel de ville de Yaoundé ce mardi 28 février 2023, dans la Salle Ongola Samba du Conseil Régional du Centre, sous le regard vigilant de la Commission de contrôle des organismes de gestion collective (CCOG) ou encore du Ministère des Arts et de la Culture (MINAC) qui ont ardemment œuvré pour que nous cheminions jusqu’à ce point culminant de notre mandat.
En fait d’AG, c’est la deuxième fois que le PCA Ateh Bazore et nous ses officiers supérieurs organisions un tel challenge. La précédente fois, c’était le 14 avril 2022 ici même à Yaoundé.
J’en profite pour suggérer qu’il soit adopté à l’AG Ordinaire de ce 28 février que la prochaine se tienne à Douala, siège social des plus grosses entreprises redevables du droit d’auteur et des droits voisins et ville entrailles du Cameroun moderne.
AP: On se souvient de l’échec de la précédente Assemblée Générale de la Sonacam, quelles sont les garanties que cette fois-ci ce sera la bonne ?
HLS: Je ne sais pas ce que vous entendez par échec. Les difficultés dans la réalisation d’un projet qui a pu se réaliser ne signifient pas l’échec. L’an passé, nous avons été secoués par un groupuscule d’affairistes habitués de la pêche en eaux troubles, les mêmes qui perturbent le droit d’auteur camerounais depuis trente ans. Ils ont manœuvré pour tenter de nous empêcher de tenir l’AG du 14 avril 2022. Mais ils se sont retrouvés face à la détermination du PCA Ateh Bazore porté par plusieurs centaines de membres de la Sonacam. C’est ainsi que l’AG avait pu se tenir devant le MINAC, avec des résolutions fortes tel que le quitus donné au Conseil d’administration pour sa gestion en 2021, et l’adoption du budget 2022.
Quand vous parlez d’échec, vous risquez d’induire vos cyberlecteurs à croire que l’AG n’avait pas eu lieu ou qu’elle n’aurait pas pris des résolutions valides. Non, la Sonacam est restée debout malgré l’adversité de ce clan groupusculaire qui utilise des moyens colossaux illicitement puisés dans le droit d’auteur pour déstabiliser les institutions de la République.
Vous demandez quelle garantie pour l’AG du 28 février 2023? La garantie c’est que nous avons eu toutes les autorisations nécessaires, acquis la salle des travaux, obtenu le soutien de la puissance d’Etat, mobilisé les moyens logistiques pour faire converger les participants des quatre coins du Cameroun vers Yaoundé. La garantie est aussi juridique: le PCA Ateh Bazore a convoqué l’AG conformément aux statuts de la société, et les décisions de cette AG seront valides si le quorum est atteint. Et je peux vous assurer que le quorum sera atteint.
AP: Le droit d’auteur au Cameroun est miné par ce qu’on peut qualifier de « Guerre des clans et de camps« … A quoi est due cette situation et comment comptez-vous y remédier afin d’instaurer la cohésion entre tous les artistes Camerounais ?
HLS: Ce qui mine le droit d’auteur camerounais n’est pas en définitive une « guerre des clans et des camps« . Bien sûr qu’il y a un clan groupusculaire qui œuvre depuis trente ans pour la pêche en eau trouble. Mais en face, il n’y a pas un autre clan ou plusieurs autres clans ou camps. On pourrait ne pas donc parler logiquement de « guerre de clans et de camps« . Mais face au clan groupusculaire aux comportements aristocratiques et despotiques, qui déstabilise le droit d’auteur camerounais, il y a la majorité des artistes camerounais qui demeure résiliente. La bonne nouvelle c’est que la résilience a commencé à se muer en offensive. Les faux prophètes du droit d’auteur camerounais qui écument les réseaux sociaux et les médias, dans une minorité ridicule, sont désormais vaincus.
La preuve, elle est multiple et par 9. Malgré leurs assauts juridiques, barbares, et/ou incantatoires, l’ordre régalien est resté à la Sonacam dirigée avec enthousiasme, détermination et sagesse par Dr Ateh Bazore et l’ensemble du top management. Quelques acteurs de surface et de fond qui ont voulu faire chavirer la barque Sonacam sont désormais isolés pour certains, et en fuite pour d’autres.
Pour rester sur votre question, je redis qu’il ne s’agit pas d’une guerre de clans ou de camps à la Sonacam, mais de secousses désormais sous contrôle, perpétrées par un clan groupusculaire et téméraire. La plupart des membres de ce groupe minoritaire et ridicule n’a pas de numéro matricule à la Sonacam, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas membres de la Sonacam ni d’aucune autre société de gestion collective au Cameroun. Ce n’est pas un abus de les qualifier de fauteurs de troubles, ou de pêcheurs en eaux troubles.
Pour en découdre définitivement avec cette « secte » du droit d’auteur, nous allons continuer à moderniser la maison sans faiblesse, à appliquer avec rigueur les textes de la société, à nous appuyer sur la puissance publique telle que la Justice, le MINAC ou encore la CCOG.
AP: Certaines indiscrétions ont fait état d’une brouille entre la Sonacam et le ministère des arts et de la culture, que répondez-vous à cela ?
HLS: Par ce que je viens d’affirmer, vous pouvez comprendre que ce sont les mêmes pêcheurs en eaux troubles qui colportent ces informations infamantes. La brouille se trouve plutôt entre eux et quelques réseaux tapis à l’ombre du gouvernement, lesquels réseaux sont régulièrement utilisés pour casser les OGC comme de l’œuf sur un rocher.
AP: Depuis l’arrivée de l’artiste Ateh Bazore à la présidence du Conseil d’administration, quel est le bilan de la Sonacam aujourd’hui ?
HLS: Vaste question. C’est vrai que je ne suis pas expert comptable ou expert financier, ni un cadre administratif de la société ayant accès à la base des données de gestion de l’entreprise, bien plus, je ne sais pas lire dans la boule de cristal. Mais de ma posture d’allié stratégique et opérationnel du PCA Ateh Bazore, en plus d’être un sociétaire de la Sonacam, je peux vous dire avec certitude que le bilan de la société est largement positif après deux ans de mandature. Vous voulez des exemples?
– En deux ans, la Sonacam a pu reconstituer les catalogues et le fichier des membres perdus pendant la transition chaotique avec l’ancien système. Ce fichier est même désormais plus étendu avec de nouvelles adhésions qui portent le fichier national des titulaires de droit et ayants droit musicaux, en termes d’auteurs, compositeurs, arrangeurs, et éditeurs, à un effectif d’environ 7 700 membres.
– La Sonacam a procédé à trois répartitions en deux ans: plus de 1400 bénéficiaires en mars 2021, plus de 1500 bénéficiaires en juin 2022, et près de 1700 bénéficiaires en décembre 2022. A l’observation, il est probant que le nombre des bénéficiaires grimpe de répartition à répartition, et l’écart se resserre entre deux répartitions. Et je puis vous assurer qu’après la récente répartition de décembre 2022, la quatrième répartition sous l’ère Ateh Bazore est prévue au courant de ce mois de mars. C’est la première fois depuis plusieurs dizaines d’années que tant d’artistes entrent en répartition avec des montants aussi élevés par tête. Inutile de vous donnez plus de détails, car il s’agit des salaires (affaires privés) des gens.
– La Sonacam a signé un Mémorandum d’entente avec un Consortium américain et obtenu du terrain dans le but de construire des maisons de la musique dans les dix régions du Cameroun. C’est un vaste projet de construction de Salles de production des spectacles, d’enregistrement audio et vidéo, officiellement baptisées « Palais de la Musique ». La première phase est prévue dans trois (03) villes ( Yaoundé, Douala et Bamenda) qui vont en bénéficier pour le moment. C’est aussi ce projet que la mafia cherche à casser.
– La Sonacam a signé des Conventions de collaboration ou réciprocité avec des sociétés sœurs sud-africaine, espagnole entre autres et avec l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) avec laquelle elle collabore désormais de manière franche et cordiale. Les détails sur cette collaboration Sonacam – OMPI vous seront présentés à d’autres occasions.
– La Sonocam a signé une Convention cadre avec l’organisation patronale la plus puissante du Cameroun: le GICAM qui regroupe plus de 400 sociétés toutes contribuables du droit d’auteur et des droits voisins. C’est dire que sur la base de cette Convention, les recettes de droit d’auteur seront plus conséquentes bientôt.
AP: Quels sont les grands chantiers de la Sonacam?
Les grands chantiers de la Sonacam demeurent la modernisation de la gestion collective, en s’appuyant sur les avantages du numérique, la mise en exécution du projet de construction des maisons de la musique au Cameroun, et une fréquence stable de trois mois pour les répartitions.
AP: Les artistes Camerounais désertent de plus en plus les studios pour se livrer à la bataille du droit d’auteur, d’où la baisse criarde de la production artistique actuelle. Vous, en tant qu’artiste, quel est votre sentiment face à cette situation regrettable?
HLS: Ce n’est pas vrai cher Monsieur, que les artistes camerounais désertent les studios. Allez en reportage dans deux à trois studios de musique dans votre ville, Yaoundé, et vous allez reformuler votre question que je trouve de mauvaise tendance. Contrairement à votre assertion qui ne se vérifierait pas, j’affirme plutôt sans réserve que la musique camerounaise est productive, et productive dans la qualité artistique, même s’il est vrai qu’on peut déplorer des déchets. C’est l’ordre naturel des choses. C’est ainsi sous tous les cieux. Les anciens comme Sam Fan Thomas, Ben Decca, Grace Decca, Elvis Kemayo et bien d’autres continuent de bosser dur pour rester sur scène, et ils font encore du succès. Ils continuent de composer.
A côtés de ces aînés dans la musique, une jeune génération pour beaucoup bien formés dans l’ingénierie du son et du management culturel est sur le terrain. Elle est dynamique. Elle est entreprenante. Elle est inspirée. Elle tire le meilleur du numérique. Je peux citer Mister Leo, Loko, ou encore la foultitude de la génération du Mbolè qui inonde le marché avec des fortunes diverses.
Au moment de vous accorder cette interview, je sors du Studio Makassi à Douala, où moi-même je suis en chantier depuis deux ans malgré mes nombreux combats. Au Studio Makassi, les rangs sont serrés. Beaucoup de musiciens camerounais y viennent pour se faire enregistrer. Parfois, il faut attendre des jours et des semaines pour passer à son tour.
Comment pouvez-vous dans un tel environnement prétendre que les musiciens camerounais désertent les studios? Allez dans le Nord, dans l’Extrême nord, l’Adamaoua ou dans les régions de l’Ouest francophone et du Nord-Ouest anglophone du pays, vous allez constater que la jeunesse musicale camerounaise est débout pour relever les défis du marché national et international de la chanson.
AP: Et pour finir?
HLS: Pour ne pas finir, je me réjouis de votre sollicitation dans ce cyberespace. Vous êtes un média novateur. Vous êtes un défricheur de terrains nouveaux. Je vous félicite et vous encourage à aller de l’avant.
Et pour vraiment conclure, je vous dirais au nom du PCA Ateh Bazore que la Sonacam nouvelle est là, qu’elle ne trahira pas les artistes camerounais en matière de gestion collective, comme l’ont fait des faux prophètes du droit d’auteur et des droits voisins dans ce pays depuis trente ans en brisant toutes les bonnes volontés qui voulaient se mettre en place.
AP: Docteur Henri FOTSO, merci d’avoir répondu aux questions de Afriquepremiere.net
HLS: C’est moi qui vous remercie!
Interview réalisée par Ericien Pascal Nguiamba Bibiang